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Planètes de Makoto Yukimura

La vie d’astronautes ordinaires

manga publié en 2001

Pas besoin d’être devin, en lisant le titre de ce manga, pour deviner qu’il s’agit de science-fiction et que l’on entre dans le domaine du space opéra. Pourtant, les clichés s’arrêtent là. Pas de conquête spatiale impliquant de sanglants combats avec les indigènes, pas non plus de gundams ou méchas, ces grandes machines de guerre si courantes dans les mangas, ni de grands vaisseaux aussi pharamineux que franchement invraisemblables.

Non, Planètes nous entraîne au milieu d’une équipe d’astronautes qui n’est pas la plus reluisante. Fée, Hachimaki, Tanabé et Yuri sont chargés de récupérer les déchets spatiaux. Ces objets de manufacture humaine sont des anciennes sondes, des satellites ou autres, largués dans l’espace au début de la conquête spatiale, mais ils sont devenus des obstacles, voire des dangers, pour les nouveaux vaisseaux qui risquent de les percuter. Inutile de préciser que les protagonistes ne travaillent pas dans le secteur le plus sexy de l’espace.

Pourtant tout au long des quatre tomes, on ne s’ennuie pas. L’intérêt majeur de Planètes est qu’il ne se limite pas à un récit linéaire de la vie des récupérateurs. Pour donner du rythme, Makoto Yukimura, le mangaka, a découpé son ouvrage en plusieurs petites historiettes qui explorent différents aspects des personnalités mais surtout des enjeux que l’aventure spatiale pourrait rencontrer dans notre futur. Il balaye un large éventail de réflexions sur la famille que l’on laisse à terre, la passion, l’amour mais aussi le rejet de l’autre, la rébellion dans le travail, la politique et enfin la guerre, très bien introduite par le problème des mines spatiales et le syndrome de Kessler : une prolifération des débris facilement assimilable à une propagation de la violence et qui mène à une destruction généralisée sans gagnants ni perdants.

Mais pour servir de tels thèmes, encore faut-il des personnages d’envergure. Mission accomplie. Les caractères s’appuient peut-être sur des stéréotypes : la nouvelle employée maladroite, trop idéaliste mais motivée, le garçon spontané, nerveux, acharné, prêt à tout pour réaliser ses rêves. Mais, ils les dépassent et on en vient vite à connaître de nouvelles dimensions de leurs personnalités à travers leur passé, leur vie à terre et surtout leurs rapports entre eux qui les font évoluer et réfléchir sur la vie qu’ils veulent mener. Ennuyeux, solennel et moralisateur Planètes? Pas du tout! Pour faire passer la pilule on voyage avec une bande de lurons attachés par une forte camaraderie et bien que l’on ne finisse pas hilare, l’humour est bel et bien là.

Graphiquement, rien à reprocher non plus. Le trait m’a rappelé celui de Hiromu Arakawa (auteur de Full Metal Alchemist) mais il est encore plus maîtrisé dans Planètes. Les proportions sont respectées, les arrières plans sont travaillés, l’enchaînement des vignettes est fluide.

Un autre élément de Planètes m’a étrangement rappelé Full Metal Alchemist. Le personnage de Locksmith étrangement semblable à Kimblee dans le rôle du salaud ambitieux, accroché à ses objectifs mais « smart » pour employer le mot anglais qui me semble plus approprié que tous ceux qui me viennent à l’esprit en français.

Bref, en quatre tomes, Makoto Yukimura a réussi à créer un univers plus riche que certains auteurs ne le font en une trentaine de volumes et il mène la danse sans temps morts.